L’académie de jazz de France depuis 1955

Barney WILEN (1957)

Lauréat en 1957

Paris 24 juin 1957
Georges Auric, Barney Wilen & André Hodeir.
©photo Jean-Pierre Leloir.

WILEN « Barney » Bernard Jean. Saxophoniste (ténor, soprano, alto) et compositeur français

Nice, 4-3-1937/ Aubervilliers, 25-5-1996.

Mère française, père américain. La famille s’installe aux Etats-Unis en 1940. Barney y séjournera six ans. De retour en France, en 1946, il étudie le saxophone alto, se produit à Nice dans un orchestre familial, puis « monte » à Paris, en 1953, pour remporter le premier prix d’un tournoi d’amateurs catégorie « cool ». Il joue au Tabou avec Henri Renaud, Jimmy Gourley, Bobby Jaspar, accompagne les musiciens américains de passage dans la capitale, enregistre avec Roy Haynes et Jay Cameron. En 1956, il représente le jazz français au Festival de San Remo. 1957 le voit lauréat du prix Django Reinhardt de l’Académie du jazz. La même année, il enregistre aux côtés de Miles Davis la célébrissime musique du film de Louis Malle, « Ascenseur pour l’échafaud », et joue avec Bud Powell, John Lewis, J.J. Johnson, Thelonious Monk, Dizzy Gillespie. Sa popularité et son renom sont au plus haut. Il accompagne Miles Davis dans une vaste tournée européenne et, en 1959, est appelé à jouer au Festival de Newport. Le monde du cinéma sollicite ses talents. Il participe à la musique, composée par Thelonious Monk, du film de Roger Vadim « Les Liaisons dangereuses » (1959) et compose lui-même la bande-son du film d’Edouard Molinaro (1958) « Un témoin dans la ville » (1959). Après une disparition de quelques années, il s’impose, au cours de la seconde moitié des années 60, comme l’une des têtes agissantes du free à l’européenne. De multiples expériences le requièrent : rencontre avec la musique indienne, mise en œuvre du concept de free-jazz-rock dans un disque culte, « Dear Prof Leary » (1968), essai de musique contemporaine avec « Le Destin tragique de Lorenzo Bandini », mixage d’une musique free avec la bande-son d’un grand prix de Formule Un (1968). En 1969, tournant le dos à la scène européenne du jazz, il part en Afrique pour un voyage d’étude qui durera plusieurs mois. Il en rapporte un disque, « Moshi » (1972), où se rencontrent le jazz et les musiques africaines captées à leur source. Puis, c’est le silence, qui va durer jusqu’aux années 80. Porté par la vague du revival bop, il renoue lui aussi avec ses amours adolescentes, mais ne veut pas se contenter de reproduire un discours ancien. La parution, en 1987, de la bande dessinée de Loustal et Paringaux « La Note bleue », qui s’inspire librement de l’homme et de sa carrière ; la sortie triomphale d’un disque signé de lui servant de bande-son à la BD ; l’accueil du Festival de Paris 1987 où il joue aux côtés de son vieux complice des années 50, Jimmy Gourley : autant d’événements qui consacrent le retour en grâce populaire d’un des rares jazzmen français d’envergure internationale. New York, 1994 : il enregistre avec Kenny Barron.
Découpée en quatre quarts, la déjà longue carrière de Barney Wilen défie tout commentaire globalisant. Du moins, les deux extrêmes - l’art des années 50, l’art des années 80 - offrent-ils quelques similitudes. On s’en voudrait de ne point accorder à notre éternel jeune homme d’être aujourd’hui comme hier l’un des successeurs les plus authentiquement fidèles à l’esprit de Lester Young. Non que Rollins ne soit passé par là ni la véhémence et la raucité du hard bop ni les embardées du free. Mais dans les sinuosités d’une phrase au velours incomparable, dans ce jeu furtif des tensions et des césures, du plein et des silences, c’est l’étrangeté lesterienne qui se laisse d’abord retrouver, silhouette en ombre chinoise sur le paravent des incertitudes contemporaines.

J.-R.M.

« Tilt » (1957) ; « Afternoon In Paris » (avec J. Lewis et Sacha Distel, 1957) ; « Ascenseur pour l’échafaud » (M. Davis, 1957) ; « Jazz sur Seine » (Milt Jackson, 1958) ; « Barney » (avec Kenny Dorham et Duke Jordan, 1959), « La Note bleue » (1986), Les feuilles mortes (avec Mal Waldron, 1990), « Dream Time » (avec Alain Jean-Marie, 1991), Le Grand Cirque (1992) « New York Romance » (1995).